dimanche 12 octobre 2008

Pomier, ch. 21-23, 25-27

Comme mes messages sont souvent TRÉS longs, je vais essayer de les faire un petit peu plus courts, mais je ne promets rien.

Est-il possible de ne pas parvenir à lire une bande dessinée?

Évidemment, de ce qu'on a dit, la BD a des codes qu'il faut connaître afin de les comprendre
complètement.

On fait référence à Lewis Trondheim, un strip duquel j'ai montré dans ce message; je l'ai trouvé tout à fait illisible à cause du rapport entre les cases, qui n'était pas du tout clair.

En général, oui, il faut être familier avec les codes. J'ai vu une évolution de cette sorte e
ntre les âges de quatorze et dix-neuf ans avec le film "West Side Story".



À l'époque, dans ma première année de lycée, j'ai vu ce film et, bien que j'aie déjà commencé à
analyser les symboles, je l'ai trouvé ennuyeux. Cinq ans plus tard, je l'ai regardé et, par exemple, dans les dix premiers seconds de ce clip, j'ai compris et apprécié beaucoup plus, peut-être même plus en dix seconds que pendant tout le premier visionnage. Cette évolution a forcément provenue de ma connaissance des codes de films et de la littérature, gagnée pendant des années de lecture et de regarder les films.

En quoi la question du point de vue est-elle cruciale?


Le point de vue est tellement variable que l'on pourrait en parler pour longtemps. Les exemples qui m'ont intéressé le plus étaient...


Les trois intrigues à la fois de Régis Franc dans Histoires immobiles et
récits inachevés. Ça arrive souvent dans le cinéma ou sur la télé, par exemple pour montrer les participants d'une conversation sur le téléphone. Amusez-vous bien avec le drame du soap américain.



On voit les trois personnages ici en temps réel, bien que l'un d'entre eux ne parle pas.



Il y a aussi les points de vue contradictoires; ici, dans le film "Shallow Hal", le personnage principal est hypnotisé, dès lors il voit la beauté « interne » des femmes et non leurs vrais représentations. On voit donc d'habitude ce qu'il voit, mais le caméra nous montre aussi parfois les points de vue des personnages « normaux », d'où la contradiction.



Il y a aussi l'idée de suspense qui existent à cause du point de vue, par exemple dans Blitz de Floc'h et Rivière. Ces "cliffhangers" créés par le point de vue - dans ce cas, on voit la femme qui s'inquiète et non ce qui l'inquiète - existent aussi dans les films {bien sûr}; voici mon exemplaire préféré {et amenez vos Kleenex}.



Quel rapport s'instaure entre texte et dessin?

Voici un exemplaire de La Terrasse des audiences de Théodore Poussin.

Le rapport ici entre le texte et l'image est très intéressant, parce que ceux qui parlent ne sont pas vus, et celui qui ne parle pas a {ou aura} un rôle important; comme dit Pomier, rien n'est superflu.

C'est comme la case de Koma où on voit la tasse de café, la cuillère, etc., qui nous disent que c'est le matin, sans un mot.

Les héros qui rejoignent le monde des lettres dans Philémon de Fred, me fait penser un peu des clips vidéo comme celui de "Heffalumps and Woozles" de Winnie the Pooh. Ici, personne ne marche sur des lettres, mais on utilise des lettres sur des boîtes {1:32} d'où viennent des personnages, et on mélange les tailles, comme à 2:33 où Pooh devient soudain très petit par rapport aux autres, bien qu'il ait été plus grand auparavant.




Évidemment, la BD peut être muette ou bien pleine de texte qui explique beaucoup
plus que les images, comme dans La bête est morte !, où raconter le récit est beaucoup plus important que le dessiner.

* Ici, il faut que je m'excuse, parce que j'ai fait du travail sur le mauvais chapitre. Si ça vous intéresserait, continuez à lire à partir d'ici; sinon, vous pouvez sauter jusqu'à "Que se passe-t-il entre les cases?" *

Muette ou sonore?

Comme j'ai dit, il y a des BDs plus ou moins muettes qui n'ont pas besoin de texte
pour raconter une histoire, comme Professeur Nimbus de Daix; ici, même les journaux n'ont pas de mots {mais c'est intéressant que le panneau du taxi a un mot pour montrer quelle sorte de voiture il est}.

Et il existe aussi la BD où les images et le texte fonctionnent ensemble {ce qui arrive la plupart des temps}.

Je trouve que c'est comme ça avec le film, où on peut avoir une séquence sans dialogue ni musique {ce clip que j'ai trouvé n'est pas très sophistiqué, mais il illustre ce dont je parle}.



On a parlé aussi du dialogue montré d'une façon pour qu'on comprenne mieux le personnage, comme dans Huckleberry Finn, où Twain a écrit le dialogue de Jim dans un dialecte.

J'ai trouvé aussi cette planche d'une BD basée sur le roman {ci-dessus}.

Que se passe-t-il entre les cases?

L'ellipse de temps qui existe entre les cases peut-être indéfinie, comme dans beaucoup de planches de La bête est morte ! où l'on voit les scènes des « bons vieux temps » ou la guerre par exemple, mais le rapport temporel entre elles n'est pas clair; quelques unes peuvent être à la fois, le prochain jour, ou bien longtemps après.

Il y aussi, bien sûr les ellipses plus évidemment de quelques seconds {ou peut-être moins},


et des ellipses plus longues.
du Black Freighter, la BD-dans-une-BD de Watchmen


Voici un exemplaire d'un film de Brian de Palma, "Soeurs de Sang", avec le style split screen, ce qui nous parle encore du rapport entre les cases. Tout se passe à la fois.







Comment s'organisent les cases dans la planche?

Je pense que, effectivement, j'en ai parlé un peu dans ce message, mais j'ajoute que l'organisation est choisie selon les besoins de l'auteur. Dans les BDs traditionnellement franco-belge, il y a d'habitude entre deux et cinq cases, environ, dans chaque strip, et quelques strips sur chaque planche. On peut aussi jouer avec cette organisation, ce qui est fait souvent dans les romans graphiques {oui, je m'intéresse surtout aux films et aux romans graphiques Sandman et Watchmen, c'est évident}.Ici, le marchand de sable monte au ciel dans la plupart de la planche, mais en dessous il y a une case plus petite avec la réaction de ceux qui l'ont vu avant cette ascension.

Existe-t-il un hors-champ dans la bande dessinée?

D'habitude. Ce n'est pas évident, pourtant, quand les cases ne sont pas séparées.

Le hors-champ, s'il y en a évidemment, peut être manipulé de plusieurs manières; en voici une, puis je vous laisse.Ici, le personnage de Rorschach décrit ses origines, existant hors-champ comme un dessinateur qui parle de son storyboard. On comprend qu'il est là, réfléchissant, bien qu'on ne le voie pas; ce qui aide avec cette compréhension, dans ce cas, est la différence des formes de bulles - les bulles qui viennent du hors-champ sont carrées, et les autres assez rondes.


1 commentaire:

Anonyme a dit…

Vous avez parfaitement illustré et compris les lectures, c'est parfait.